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Au début de la 3e semaine de mai, rares sont ceux qui auraient prédit que Bombardier finirait la semaine avec un gain de popularité. L’entreprise terminera pourtant cette semaine mouvementée avec une image rehaussée, celle de David qui est allé déranger Goliath sur son terrain et qui est à l’origine de la contre-attaque canadienne aux velléités protectionnistes incessantes de la Maison-Blanche.

En début de semaine, l’image de Bombardier était pourtant au plus mal dans l’opinion. La lecture des journaux et surtout, une analyse des échanges Twitter effectuée à l’aide de l’outil nexaintelligence de la société montréalaise Nexalogy, révèlent que n’importe quel gestionnaire communication/relations publiques aurait eu de sérieux mots de tête en anticipant devoir défendre la réputation de l’entreprise.

Dans la foulée de la houleuse réunion des actionnaires de la semaine précédente, en prévision de laquelle la Caisse de dépôt avait publiquement demandé la tête du président du conseil Pierre Beaudoin, l’attention était accaparée lundi par les sorties de Laurent Beaudoin et de Michael Sabia qui s’accusaient mutuellement de mentir à savoir si la Caisse avait ou non avisé Bombardier de son intention de demander publiquement la tête du fils de Laurent Beaudoin.

Cet épisode suivait de près la crise de confiance encore fraîche créée par l’annonce d’importantes augmentations de traitement accordées aux dirigeants de Bombardier qui venait de recevoir une aide publique de Québec et d’Ottawa.

Si cette pilule est mal passée au Québec, elle a été encore plus difficile à avaler au Canada.

Les mots ne manquaient pas aux éditorialistes ni aux meneurs d’opinions sur le web, pour alimenter la réputation d’assisté social corporatif dont la presse et une partie de l’opinion anglophone aiment parfois affliger Bombardier.

Mais en milieu de semaine, le vent a tourné.

Bombardier a d’abord annoncé la signature d’un important contrat d’impartition de services informatiques avec IBM. Cette association a été perçue assez positivement particulièrement au Canada comme en témoignent les échanges sur Twitter. Non seulement cet accord laisse entrevoir une possible réduction des coûts d’exploitation de l’entreprise, il est toujours bien vu de s’associer à une marque connue qui a bonne réputation.

Jeudi, on apprenait que Bombardier négocie avec une société chinoise qui pourrait investir dans la C-Series. Excellente nouvelle si elle se concrétise, à la fois pour les coffres et pour l’image de l’avionneur. Une belle occasion de se dégager de cette image de quémandeur d’état en validant non seulement la qualité de son produit, mais aussi sa capacité à faire des affaires avec d’importants joueurs sur la scène internationale. Cette négociation est aussi source de fierté pour les Canadiens, car elle donne l’impression qu’ils vont enfin pouvoir sortir un peu de l’ombre américaine tout en se rapprochant de la Chine. Un rapprochement qui donnerait potentiellement une entrée dans l’important marché asiatique.

Pour finir, le gouvernement américain annonçait jeudi qu’il allait donner suite à la plainte de Boeing contre Bombardier pour pratiques commerciales déloyales. Paradoxalement, il semble que ce soit cet événement qui pourrait s’avérer le plus payant pour Bombardier cette semaine.

La réaction du gouvernement Trudeau qui semblait jusque là condamné à avaler des couleuvres à perpétuité devant les menaces protectionnistes du président américain, a saisi la balle au bond et menace à son tour d’annuler une commande d’avions militaires à Boeing si elle persiste à s’acharner sur Bombardier.

Dans la twittosphère canadienne, Bombardier est soudainement devenu le héros du jour.

Non seulement l’entreprise s’est retrouvée associée à une réaction épidermique longuement attendue par une partie de l’opinion, mais elle confirme que Bombardier dérange et que le Canada peut concurrencer les Américains sur un terrain qu’ils dominent depuis très longtemps. Il faut se rappeler que le gouvernement canadien avait abandonné le développement de l’avion Arrow dans les années 50 à la suite de pressions venant de Washington.

Après le bois d’œuvre, le lait et l’ALENA, une réaction est finalement venue d’Ottawa et c’est Bombardier qui en est à l’origine. Sans le savoir, l’avionneur a touché plusieurs cordes sensibles dans l’opinion canadienne cette semaine.

Sur le fond, peu importe que les Américains soient motivés par le désir de gêner les négociations de Bombardier avec la firme chinoise ou que les Chinois négocient avec Bombardier pour souffler dans le cou des Américains, l’entreprise en sort gagnante sur plusieurs fronts notamment sur le plan de l’image.

Ce gain pourrait aussi grossir les coffres de l’entreprise. Sur les marchés boursiers comme en politique, la perception est réalité, une réalité qui fait parfois rapidement monter ou chuter le cours des actions d’une entreprise.

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